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Published on: INTERVIEW TALENTY

Victoria Mekkoui, Fondatrice de OPOA [Interview]

Rendez-vous à quelques rues du métro République, pour un shopping pas comme les autres. Pas de marketing, ni d’emballage sur les rayonnages, je me suis munie de mon bocal en verre, direction la nouvelle boutique en vrac, nommée OPOA (à prononcer « au poids »).

Victoria Mekkoui, très souriante m’accueille dans sa petite boutique. La toute jeune entrepreneuse, m’installe à une des petites tables rétro et me sert une tasse de thé. Notre interview peut débuter.

Victoria m’annonce timidement qu’elle n’est pas trop à l’aise sur le fait de se vendre. L’entrepreneuse fait partie de ces personnes qui font et concrétisent leur conviction bien avant de penser business.

D’ailleurs le début de l’aventure OPOA est plutôt atypique. Pas de business plan ou une grande ambition au préalable, mais une réelle envie de répondre à un besoin et de faire bouger les lignes.


LA PRISE DE CONSCIENCE


Victoria n’a que 24 ans, mais pourtant ça fait déjà deux ans qu’elle travaille sur le projet en vrac. « J’ai eu une prise de conscience par rapport à ce que je consommais et ce que je laissais derrière moi. Et je me suis dit que j’avais envie d’avoir une démarche plus écologique et trouver des alternatives pour être en phase avec moi-même. » m’explique Victoria.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, OPOA est né dans la salle de bain de la fondatrice.

« J’étais dans ma douche. En fait j’ai un toc. J’adore compter le nombre de fois où je fais les choses. Par exemple, je compte combien de fois je suis passée à cet endroit. » Victoria a donc compté machinalement le nombre de bouteilles de shampoing qu’elle avait utilisées ces derniers mois. Le constat est évident et édifiant. Pourquoi ne pas garder la même bouteille et la remplir quotidiennement pour éviter de produire des déchets inutiles ?

Ce qui est intéressant, c’est qu’à l’origine cette entrepreneuse n’était pas dans une démarche écologique. Du coup, sa réaction a été innocente. Elle souligne d’ailleurs amusée, « J’avais l’impression d’avoir trouvé une idée qui allait révolutionner le monde.  J’ai appelé mon père et je lui ai dit : « Papa j’ai trouvé une super idée ! On va révolutionner le monde tu vas voir. » Evidemment, mon père c’est gentiment moqué de moi, en me disant que cela existait jusque dans les années 60. « Tu n’inventes rien ! ».

L’histoire aurait pu s’arrêter là et n’être qu’une bonne blague que l’on raconte au dîner de famille.

Mais Victoria avait déclenché un vrai questionnement sur sa façon de consommer.

« C’était une vraie révélation, car ça correspondait en réalité à tout ce que j’étais et ce que j’avais vécu, étant fille de brocanteur. ». Elle a, en effet, toujours été adepte de la seconde main. « Je viens d’un milieu modeste donc mon père m’a toujours appris que si je voulais acheter quelque chose de nouveau, il fallait vendre mes anciennes Barbies. Il y avait toujours une sorte de cycle. ». Si le projet a débuté sur une anecdote, en réalité OPOA correspond parfaitement au mode de vie de Victoria.


UNE ÉPICERIE RESPONSABLE


Victoria est une véritable autodidacte. Après son bac elle a tenté plusieurs voies d’études, du droit au cinéma. Une liberté qu’elle s’est octroyée en travaillant en parallèle dans des restaurants.

C’est partant de cette expérience, qu’elle a décidé d’ouvrir une boutique essentiellement alimentaire.

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© Gael Rapon

Mais qui dit alimentation, dit normes à respecter. Victoria nous explique son parcours pour faire de son rêve une réalité.

« J’ai commencé par conceptualiser l’idée, me renseigner sur la réglementation et sur le marché. Quand le projet a été viable, j’ai fait beaucoup de salons pour rencontrer les producteurs, et voir ce qu’ils proposaient. J’ai monté mon business plan et me suis appuyée sur le conseil d’amis, autour de moi, qui avaient déjà monté leur entreprise. Par la suite, j’ai travaillé avec la CCI de Paris qui m’a aidée à faire mes recherches, et à financer le projet. Mais j’ai surtout eu l’énorme chance de travailler dans le Magasin Biocoop 21, de la rue du Château d’eau. »

C’est cette dernière expérience, avant l’ouverture de sa propre boutique, qui a été particulièrement impactant dans la réussite de Victoria. En effet, cet emploi lui a permis de tester son concept grandeur nature. Une opportunité en or !

« J’étais en mode observatrice ; ça m’a évité bien des erreurs de départ. C’était une expérience folle. » s’enthousiasme Victoria

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© Gael Rapon

Le 24 septembre dernier, Victoria ouvre sa propre épicerie de proximité, qui couvre un maximum de besoins quotidiens.

On y trouve des légumineuses, des fruits, des graines, des céréales, de la confiserie, de la biscuiterie, des féculents, des laits végétaux, de la confiture, du fromage et de la charcuterie. Chez OPOA on fait aussi du beurre, et l’objectif est même de faire de l’huile, du vinaigre, du miel, et de développer une cave à vin. Un véritable art de vivre.

A première vue, une telle qualité de produits pourrait présager un trou dans notre porte-monnaie. Mais pas d’inquiétude, pour les tous petits budgets, OPOA est partenaire de l’application TOGOODTOGO. Une belle association qui permet de racheter les invendus à moindre prix tous les lundis.

Et, parce que Victoria pense aussi à combler nos petits creux, la boutique en libre-service se transforme aussi en cantine responsable, chaque midi.


L’AMOUR DU PRODUIT


En développant son projet, Victoria s’est rendu compte que le vrac est une démarche écologique, mais aussi particulièrement gustative, puisqu’il nous rapproche de l’aliment.

« Si j’adore les publicités, belles et créatives, je trouve que l’industrie agroalimentaire, parfois, nous distance trop du produit, de son gout et de son apparence. » explique Victoria. Il est vrai que l’on se laisse parfois plus séduire par une marque ou un concept, plutôt que par le produit et ses bienfaits nutritifs. A contrario, dans la démarche de l’épicerie en vrac, les silos permettent de valoriser avant tout, l’aliment, tout en créant une expérience sensorielle. « J’adore entendre le bruit du produit tomber dans le sac ou le bocal, et les odeurs. C’est une manière de remettre au gout du jour le rapport entre l’homme et l’aliment. » confie Victoria.


L’ EXPÉRIENCE AVANT TOUT


Victoria est particulièrement attentive à, l’expérience client, dans sa boutique.

Si à l’origine elle souhaitait ne proposer aucun emballage, l’entrepreneuse a privilégié l’accessibilité de son commerce. Ainsi, si tout le monde ne vient pas, dès sa première visite, avec un bocal, chacun pourra trouver sur place des sacs en papier kraft, qui permettent de faire le premier pas vers le zéro déchet.

Mais le gros plus de la boutique, est de nous proposer des bocaux à graver sur place, pour éviter d’imprimer et de coller une étiquette. Cette alternative représente la dimension expérimentale que Victoria souhaite donner à OPOA.

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« J’ai vraiment envie que ce lieu soit un petit laboratoire, où l’on fait des essais pour consommer autrement. ».

Dans cette même démarche, l’épicerie en vrac propose également des sacs, créés à partir de tee-shirts usagés.


UNE CARTE ZÉRO DÉCHET


L’objectif est clair : faire le moins de gaspillage possible dans la boutique, dans le but d’aboutir à un espace zéro déchet.

Pour se faire, il ne s’agit pas que de se questionner sur les contenants, les aliments sont eux aussi mis à l’épreuve.

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© Gael Rapon

Les fruits et légumes sont retravaillés en jus, en soupe, en gâteaux ou en assiettes composées, pour ne pas avoir de pertes. Les bols, préparés grâce à une cuisson lente, à la vapeur ou au four, qui garde un maximum de vertus, sont composés d’une base de riz avec des légumes. Une cuisine originale qui s’appuie sur les produits disponibles. On trouve ainsi  une carte savoureuse avec des variantes vegan pour répondre à toutes les envies.

En plus de limiter les déchets, ces bols permettent aussi de découvrir de nouveaux aliments que l’on peut, par la suite, acheter en vrac. Et si vous n’avez pas l’âme d’un cuisto, les plats sont aussi à emporter !

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© Gael Rapon

A noter que Victoria travaille également, main dans la main avec les producteurs pour que le cycle complet soit éco-responsable.

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UNE ATMOSPHÈRE 100% COSY


Halte aux clichés. Sachez qu’écologie rime aussi avec style.

Dès la devanture on est séduit par la chaleur du lieu habillé de bois, où l’on retrouve de jolis étalages coloré et de jolis objets chinés. Aménagée par Victoria et son père, la boutique est aussi idéale pour prendre un café ou un thé au milieu de l’après-midi – il y a même une formule café + biscuits à 3,60€, faire du coworking en petit comité ou prendre un déjeuner équilibré dans cette petite cantine avant de faire ses courses en libre-service.

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Alors, je n’ai plus qu’un mot : A vos bocaux !

En bonus : une petite recette pour faire frétiller vos papilles 🙂 

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  1. Eh bien c’est la grande classe ! 24 ans en plus, c’est fou.
    Et au delà de l’éthique et de le responsabilisation, ce mode de consommation est beau jusqu’à l’esthétique ! J’ai hâte que ça se démocratise.
    Félicitations à elle et merci pour cet article !

  2. Super merci pour la bonne adresse ! J’y passerai lors de mon prochain passage à Paris. En attendant je vais rajouter OPOA sur mon site : http://zerowasteforlife.com/
    Vive le zéro déchet !

  3. Post comment

    Sarah conte Philly says:

    Wow c’est impressionnant d’avoir autant de niak à 24 ans! Bon courage à elle, je lui souhaite beaucoup de succès!

  4. Merci pour cette découverte, c’est passionnant son parcours et surtout sa démarche ! Ça donne de l’espoir et surtout envie de soutenir. En espérant que je puisse passer par là quand je monte sur Paris. Bonne journée ! 🙂

    1. Oui je te conseille d’y faire un tour dès que tu seras sur Paris. Je suis sûre que tu vas adorer 🙂

  5. Vraiment chapeau pour l’initiative. Moi qui suis déjà adepte de ce genre de boutique, j’y serais venue avec plaisir si j’habitais Paris.

    1. Si un jour tu viens à Paris n’hésite pas à pousser la porte 😉