Nous le savons, la mode est l’une des industries les plus polluantes au monde.
Alors, forcément lorsque l’on a découvert la marque de vêtements éthiques et responsables pour les enfants, nommée “Perpète”, nous avons eu envie d’en savoir plus.
Perpète c’est l’histoire de deux femmes, Sandra Héteau et Nathalie Parmentier, professionnelles dans le milieu de la mode, maman épanouies, qui ont eu envie de changer les codes en habillant « les cool kids».
Le rendez-vous est pris avec Nathalie co-fondatrice de cette nouvelle marque qui propose des vêtements qui durent perpète pour préserver notre planète.
Nous avions autant envie de tout savoir sur le concept de la start-up que sur le parcours professionnel des fondatrices qui n’ont cessé de se questionner au fil des années sur le sens de leurs missions.
En effet, en travaillant dans une grande enseigne de “fast fashion”, les questionnements pour Nathalie prenaient petit à petit la forme d’une schizophrénie. Elle m’explique dans cette période « ressentir un accomplissement en fin de journée pour avoir bien fait son travail, tout en essayant de passer au zéro déchet à la maison ». Pourtant, la salariée de l’époque qu’elle était ne manquait pas de convictions.
Cette situation nous amène à nous questionner sur la difficulté à dissocier vie professionnelle et vie personnelle pour celles et ceux qui pourraient être sujettes au syndrome de la bonne élève.
Nathalie, tout comme Sandra, a tout de même fait un choix. Celui de créer sa propre entreprise qui se base sur ses convictions profondes, sans compromis. La naissance de son fils a été un véritable déclic. C’est à ce moment que l’aventure Perpète débute.
Evidemment, Nathalie aurait pu changer de domaine d’activité. Faire le choix de ne plus travailler dans le secteur de la mode. Mais permettre de modifier les façons de faire et de consommer dans une industrie qui doit évoluer et se réinventer fut un choix de cœur et de raison.
Pour
comprendre l’origine de la marque, Nathalie me raconte son histoire.
Plus jeune, la cheffe d’entreprise rêvait d’être globetrotter professionnelle et de travailler dans des associations humanitaires. Une ambition peu commune qui indique son goût du partage et de la découverte.
Pour réaliser ce souhait, à 18 ans elle ambitionne tout d’abord d’intégrer Science Po. Mais suite à une prépa d’été, Nathalie ne se sent pas à sa place et fait le choix d’un cursus marketing à l’université Paris-Dauphine.
En troisième année d’étude, poussée par son goût du voyage après plusieurs séjours au Cambodge notamment, Nathalie s’envole pour étudier un an en Argentine. Une expérience riche qui marquera sa trajectoire. “En revenant j’étais totalement déprimée et mon seul but était de trouver un emploi qui me permettrait de travailler en Amérique latine” me relate Nathalie. Pour atteindre ce souhait, elle complète donc sa formation par une quatrième année plus stratégique en “management organisation” dans le but d’intégrer l’ESSEC l’année suivante. Nathalie tente le concours, mais cela ne fonctionne pas…
Cette désillusion la pousse à une nouvelle remise en question, mais l’amène aussi à prendre la décision importante de partir un an à l’étranger. Nathalie décroche un stage à Shanghai dans une entreprise qui produit des vêtements. Véritable révélation. “Je découvre que ce qui m’intéresse vraiment est d’être acheteuse textile” m’explique-t-elle. De retour en France elle décroche un master achat, à Bordeaux.
Diplômée, alors qu’elle travaille aux Galeries Lafayette, Nathalie se rend compte qu’elle a bien du mal à se sentir épanouie dans un poste dans lequel elle ne se sent pas totalement libre. Mais comme les choses sont souvent bien faites lorsque l’on reste ouvert aux opportunités, un appel s’apprête à tout changer. “J’avais envoyé une candidature spontanée chez H&M, plusieurs mois auparavant, car l’idée de travailler dans une entreprise leader m’intéressait” me confie Nathalie. Et c’est à ce moment précis de remise en question que la responsable des ressources humaines la rappelle. Elle est embauchée en tant que chef de produit pour la France sur une partie des collections enfants et sur la gestion de la marchandise. “Je découvre une entreprise qui donne l’opportunité aux personnes qui ont du potentiel, peu importe les diplômes”.
Très vite, à peine deux ans après son entrée dans l’entreprise, Nathalie devient responsable merchandising France et Belgique, à seulement 27 ans. Du fait de cette promotion, elle déménage alors à Bruxelles.
L’histoire aurait pu s’arrêter ici. Mais c’est à ce moment que se croisent l’ambition personnelle et professionnelle.
Nathalie m’explique, “Plus le temps passait et plus avec mon mari nous nous mettions à changer notre manière de vivre. Nous avons commencé à manger principalement bio, à tendre vers le zéro déchet et à faire nos courses dans des coopératives. Le soir, lorsque l’on rentrait du travail, inévitablement nous nous questionnions sur nos métiers.”
Avec la venue de son premier enfant et son départ de l’entreprise H&M, la remise en question est inévitable. “Je n’étais plus du tout en phase avec mes valeurs. C’était une période un peu difficile” se souvient la fondatrice.
Entreprendre, qui avait toujours été une option pour Nathalie qui vient d’une famille d’entrepreneurs, semble une évidence. “Mon père m’a toujours dit que j’avais les qualités pour entreprendre à mon tour. Je me suis toujours dit qu’un jour j’aurai ma boite”.
Si la période semblait donc idéale pour “se lancer”, Nathalie ne se sentait pourtant pas avoir les épaules pour le faire. Elle accepte donc un emploi salarié chez Levis. “Cette expérience a été très importante pour me redonner confiance, mais je me suis rendue compte que la position de salarié dans un poste précis ne me convenait pas”.
A cette même période, Nathalie attend son deuxième enfant. A la perspective de son congé maternité, toutes les idées et l’envie d’entreprendre sont venues spontanément. “Tout d’un coup, tout a été limpide. J’ai su que je voulais monter une marque enfant qui soit inscrite dans l’économie circulaire”.
Pour mener à bien ce projet Nathalie décide de rencontrer un maximum de personnes.
“Je connaissais toute la partie distribution, du fait de mon métier, mais je ne connaissais rien à la production”. Objectif de cette démarche : se faire de nouveaux contacts et rechercher l’information. Elle démarche alors des personnes sur LinkedIn, dans son réseau professionnel, mais aussi au sein de réseaux entrepreneurs. “C’est d’ailleurs par ce biais que Sandra m’a contacté” confie Nathalie.
A cette époque, Sandra était styliste et modéliste depuis dix ans. Suite à une remise en question personnelle, elle se rend compte également que ce qui ne lui convient plus dans son métier est de ne pas être alignée avec ses valeurs. Depuis la naissance de son second enfant, Sandra cherchait donc également un nouveau défi professionnel dans la mode éthique.
Mêmes valeurs, même envie de changer leur mode de vie et de carrière, elles se retrouvent quelques jours plus tard sur un événement annuel destiné aux professionnels de la mode éthique. “Nous avons passé beaucoup de temps ensemble, puis nous avons continué de nous appeler régulièrement. A un moment donné l’idée de nous associer est venue spontanément”.
Si Sandra ne voulait pas spécialement entreprendre et Natalie pas forcément s’associer, c’est en discutant que tout cela est devenu une évidence. “Nous voyons les choses de la même façon, nous avons les mêmes envies et surtout nous sommes très complémentaires” précise Nathalie.
Le but de leur startup est très vite défini :
Alors qu’il serait tentant d’acheter des choses de faible qualité et peu coûteuses pour des enfants qui grandissent plus vite que l’éclair, elles décident de proposer une nouvelle solution qui diminue la surconsommation. Elles souhaitent créer des vêtements beaux, bio mais surtout très costauds. Ainsi, les vêtements achetés peuvent être renvoyés gratuitement, permettant en plus d’obtenir une réduction sur le nouvel achat. Les vêtements sont donc vendus, revendus, encore et encore.
Le concept parfaitement défini, de septembre à décembre 2018, pendant que Nathalie reste auprès de son second enfant, Sandra et leur graphiste travaillent sur l’identité de marque et le graphisme produit. Au début de l’année 2019, l’équipe réunie, tout s’enchaîne.
Pour trouver un nom impactant, elles se font aider par un onomaturge, professionnel du bon mot. “Perpète” est une évidence lorsqu’il est évoqué. Il évoque les produits qui durent, mais fait aussi référence aux parents à qui l’on dit souvent “qu’ils prennent perpète avec un enfant”.
Avant de voir naitre le site web, les fondatrices font le choix d’une campagne participative en ligne. “Notre campagne de crowdfunding a été lancée en deux mois. C’était très serré pour faire des prototypes, faire notre shooting, créer une page… Ce fut une très bonne expérience, car cela nous a permis d’avoir des retours sur les produits, d’identifier les favoris et vérifier que nous répondons à une vraie problématique” explique Nathalie. “Le choix de faire une campagne de crowdfunding est aussi le moyen de se positionner rapidement sur le marché et d’avoir des précommandes pour lancer la production plus sereinement”.
Les fondatrices de Perpète ne s’y sont pas trompées puisque l’objectif est atteint en quatre jours seulement ! Il faut dire que Nathalie et Sandra se donnent les moyens de leur réussite en mobilisant absolument tous leurs contacts. Le crowdfunding est d’ailleurs un véritable tremplin pour les entrepreneurs. Cette campagne participative permet d’oser parler de son projet autour de soi et de faire son autopromotion sans complexer.
Aujourd’hui, habiller les petits avec des vêtements de qualités tout en respectant son budget et la planète est donc à notre portée.
Rendez-vous sur perpete.co
“Nous espérons que demain notre mode de fonctionnement, qui allie nouvelle collection et seconde main, devienne la norme” confie les entrepreneures. Perpète se positionne en tant que prescripteur dans un milieu qui nécessite d’avoir de nouveaux repères.
Une histoire entrepreneuriale qui démontre que l’on peut entreprendre de façon responsable, à son échelle, dans tous les domaines. “Le soir je me couche beaucoup plus sereine qu’avant” conclut Nathalie.