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Published on: INTERVIEW TALENTY

Romain Battesti et Thomas Goetschy, fondateurs de La Maison Sage [Interview]

La Maison Sage et l’un des lieux nocturnes les plus mystérieux de la capitale. Pas de nom écrit en grosses lettres en néon sur la rue, pour identifier l’endroit. Une communication mystérieuse qui privilégie les jeux de mots.

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Pour entrer chez La Maison Sage il faut connaître l’adresse, avoir la bonne énergie, monter à l’étage et être prêt à faire la fête.

La porte, donnant sur une rue proche de la place de la République – dans le 3ème arrondissement de Paris -, est impressionnante, bien que passant inaperçue si on ne fait pas attention. Il faut dire qu’elle est judicieusement peinte en noire, et que, seul le logo nous indique que c’est bien par ici que la fête commence. Bien plus qu’un club, ce lieu hybride a ouvert ses portes en novembre dernier.

Le soleil ne s’est pas encore couché, mais je retrouve pourtant, dans cette maison de nuit, les deux fondateurs du concept La Maison Sage : Romain Battesti et Thomas Goetschy.

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Je monte le premier étage et me retrouve dans un sublime espace mêlant références de l’enfance, pièces vintages et photographies. Bien installée dans un fauteuil club, l’interview peut débuter.


UN DUO SUR LA MÊME LONGUEUR D’ONDES


Derrière La Maison Sage, deux trentenaires aux bonnes ondes communicatives. Fondateurs du concept et directeurs artistiques, ils ont avant tout conçu un lieu qui leur ressemble. Comme un grand loft en plein cœur de Paris, que l’on rêverait tous d’acquérir, pour inviter ses amis.

A voir leur complicité, la rencontre entre ces deux passionnés semblait inévitable.

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A gauche Romain et à droite Thomas

D’un côté, il y a Thomas.  Après avoir été musicien pendant 8 ans, il fait ses armes dans l’événementiel en intégrant l’agence Savoir Faire. Il est alors en charge de projets qui allient culture et marque, et travaille notamment pour le Wanderlust, ou encore, Silencio.

Suite à cette expérience, il crée le Ground Control, lieu éphémère, situé sous la Cité de la Mode et du Design, pour sa première édition.

De l’autre côté, il y a Romain. Il a fait ses classes dans le milieu de la nuit, en débutant en tant que stagiaire, au Bus Palladium, il y a 10 ans. Puis, il monte une agence événementielle et un label qui s’appelait French Made, avant d’arriver à la direction artistique du club Le Rouge, et du Showcase Paris. Mais Romain ne s’arrête pas là, puisqu’il devient agent d’artistes pour l’agence Allo Floride. « C’est dans ce cadre que j’ai rencontré Thomas. Nous nous sommes retrouvés autour de cet appel à projet. » souligne Romain.

Avec de tels parcours complémentaires, évidemment, le feeling a été immédiat.

Nous sommes en avril 2015, lorsqu’ils sont sollicités – ainsi que quatre autres candidats – pour répondre au brief ambitieux de créer un nouveau lieu artistique, culturel et événementiel dans Paris.

Un contact commun présente alors à Thomas et Romain ce lieu « qui ne ressemblait pas du tout à ce qu’il est aujourd’hui » précise Romain. A l’époque un groupe d’événementiel souhaite l’acquérir pour en faire un espace consacré aux relations presse. Mais, à la venue d’un nouvel équipier, ils proposent au propriétaire d’en faire plutôt un club techno dans l’inspiration du Rex. Étant en premier étage d’un immeuble, le constat acoustique est sans appel. C’est à la suite de ce refus, que l’équipe lance l’appel d’offre.

Thomas et Romain tombent immédiatement d’accord sur le potentiel.

Et puis, il  y a  Franck. A l’origine il avait un rôle d’investisseur, mais aujourd’hui il travaille aux côtés du duo sur l’exploitation de La Maison Sage. Sans ce troisième élément, le projet n’aurait, d’ailleurs, jamais vu le jour.


LA GENÈSE D’UN CONCEPT


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Aussi fou que cela puisse paraître, les deux fondateurs ne se connaissent pas encore, mais la même énergie les anime. Ils décident donc de se retrouver devant un petit déjeuner après la visite, pour échanger sur leurs envies. Romain revient sur cette matinée qui a tout déclenché et qui leur a permis de gagner l’appel d’offre. « Thomas sortait de cette expérience Ground Control, et de mon côté, le club commençait à moins me stimuler. Je n’y trouvais pas vraiment ce que je voulais. La majorité de mes amis n’avaient plus vraiment envie de venir, car la musique était trop marquée club, trop électronique ou trop hip-hop ».

Ils ont envie de nouvelles synergies et leurs amis ne souhaitent plus passer des soirées à regarder le DJ mixer, mais, au contraire, échanger et profiter ensemble de la soirée. Thomas souligne, « On s’est vite rendu compte que ce que l’on préférait, c’était les soirées entre potes, dans un appart, donc on a voulu recréer cette ambiance. ».

Après avoir défini le besoin, les nouveaux associés se retrouvent pour un brainstorming. « Très vite on a listé ce que l’on voulait et ce que l’on ne voulait pas » m’explique Romain. Puis ils se sont mis à la recherche d’un nom. « On a écrit près de 80 propositions » se souvient Thomas.

Le lendemain, en se penchant à nouveau sur la liste, une évidence : La Maison Sage – le troisième nom qu’ils avaient inscrit.

Le nom est très symbolique.

La maison est un endroit chaleureux, convivial, où l’on aime inviter des gens qui nous sont chers. Cela fait aussi référence aux fêtes que l’on fait chez soi, qui ont une atmosphère bienveillante et respectueuse. D’ailleurs, Thomas remarque « Même si les gens sont différents, à la table, tu fais toujours l’effort d’être ouvert d’esprit et d’accepter la discussion et le dialogue lorsque tu es invité chez quelqu’un ».

Le côté sagesse, lui, prend le contre pied de ce que Thomas et Romain dessinent pour le lieu.

S’il a de la bienveillance avant tout, le propre de ce lieu nocturne est l’esprit festif et libre. Mais c’est aussi le rythme des mots qui les a séduits. « La Maison Sage, c’est un nom français, dans une esthétique classique et chic », souligne Romain.

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AMBITION ET EXPÉRIMENTATIONS


Qui dit nom, dit logo.

Celui de La Maison est particulièrement symbolique et identitaire. D’ailleurs, Romain le porte comme un écusson sur son bomber.

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C’est Medhi, qui est aussi leur voisin, qui a créé le logo. Ce choix est très représentatif de l’état d’esprit de Romain et Thomas.

Romain revient sur cette quête du bon logo « On avait une idée de ce que l’on voulait, mais n’étant pas graphistes, nous avons fait appel à quatre agences. Mais toutes ne nous ont pas montré la motivation que nous attendions, puisqu’elles nous ont rendu principalement des pistes créatives. Surement par peur de ne pas être sélectionnées. Medhi, lui, en a fait une centaine, ce qui prouvait son envie et son investissement. Même s’il n’avait pas trouvé exactement ce que nous recherchons, en proposant 40 exemples de plus que les autres, on lui a fait confiance et on a cherché ensemble le logo parfait. »

Dans ce logo, le duo avait déjà identifié vouloir retrouver des lignes, une référence aux fraternités, un effet blason. Thomas se souvient encore lorsqu’ils ont découvert la version finale, « Ce logo a été un coup de cœur, ça a été immédiat. ».

Personnellement je trouve ce logo très efficace. Très graphique, il s’adapte à tous les supports, et surtout, il représente le lien. Celui qui lie le duo, mais aussi le symbole de toutes les activités qui s’entremêlent dans ce lieu insolite.

Evidemment, il était maintenant temps de parler musique.

Le parti-pris est direct et sans appel. Comme à la maison, il fallait qu’il y ait un peu de tout pour plaire au plus grand nombre.

Chez La Maison Sage, la playlist est éclectique. La seule contrainte, éviter les sons trop introspectifs ou trop violents. Les fondateurs et directeurs artistiques l’expliquent, « L’idée est de ne jamais être segmentant et toujours favoriser l’échange entre les gens ». D’ailleurs, on ne vient pas à La Maison Sage pour écouter de la musique, mais on y vient pour faire la fête ! Cette intention est si marquée que la programmation musicale est peu relayée par La Maison Sage.

« L’objectif est d’attirer les personnes pour le lieu et les personnes qui le fréquentent, plutôt que pour les artistes. C’est d’ailleurs pour cela que nous n’avons pas de billetterie », précise Romain.

Cependant, nos oreilles et notre sens du rythme ne vont pas être déçus. Chaque soir, on bouge sur du rock, de la pop, du hip-hop, un peu de rap mais surtout sur du disco, du funk et du soul.

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Le point commun de tous les sons qui passent dans La Maison Sage c’est qu’ils nous décrochent un sourire en une seconde chrono, et qu’ils nous donnent envie de danser les bras écartés. Après tout, c’est la seule chose que l’on attend d’une bonne soirée non ?

Le pari des directeurs artistiques est réussi : une ambiance chaleureuse et groovie.

Thomas souligne, « La musique c’est fédérateur par essence, donc on veut retrouver cette dimension dans notre programmation. ». Et pour cela, rien n’est dû au hasard. « Les Dj ou les artistes sont très importants. C’est une question de feeling et de ressenti. Il faut  qu’ils comprennent l’ambiance générale. Nous avons un assistant qui fait de la veille sur tous les nouveaux projets musicaux et les nouveaux talents. On se prend trois heures par semaine, essentiellement pour l’écoute. » m’expliquent les directeurs artistiques.

Car, si l’idée reste, de créer une communauté autour du concept plutôt qu’autour de la musique, de lui faire découvrir de nouveaux talents, est une véritable plus-value.


UNE MAISON DE VIE DE NUIT


La Maison Sage c’est un mix de couleurs, de matières et de formes.

L’objectif de Thomas et Romain est de créer un cocon chaleureux où l’on se sent bien. « Nous sommes fiers quand les gens arrivent et oublient immédiatement leurs soucis en rentrant ici » exprime Romain.

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Pour arriver à proposer une atmosphère singulière, les associés ont tout chiné. « On a pris comme contre-exemple les clubs où l’on retrouve partout les mêmes dominantes de couleurs et de matériaux. Nous, on a décomposé l’espace en plusieurs petits coins, avec chacun une tonalité et une personnalité différente », m’explique Thomas.

Passant du salon au bar, de la petite piste de danse à la chambre, ou du fumoir à l’étage supérieur, on a l’impression de voyager et de se sentir tantôt prêt à discuter, à danser ou même à se reposer.

Rentrer dans La Maison Sage c’est un peu comme se balader dans plusieurs tableaux de Pinterest.

Mais, dans cette grande pièce, il y a aussi un vrai questionnement sur les flux de circulations. Une problématique pointue et complexe qui aurait pu faire penser que Romain et Thomas aient fait appel à un architecte d’intérieur. Pourtant il n’en ait rien. Ils sont totalement autodidactes. Ils me racontent, « C’est d’ailleurs à la suite des premiers brainstormings que l’on a commencé à choisir des matières, à regarder Pinterest et leboncoin. De fil en aiguilles, on a donc construit notre propre tableau inspirationnel. ».

Le résultat est bluffant.

S’il y a des imperfections elles nous permettent de se sentir comme à la maison. C’est beau, mais on ne résiste pas longtemps à s’affaler dans le canapé, ou rester quelques minutes au bar customisé par le duo. Thomas m’explique, « L’idée était que l’attente au bar puisse être encore stimulante. Outre les barmen qui font des cocktails, tu peux découvrir toute une collection d’objets de ton enfance ». Cet élément décoratif est une belle façon de laisser ses soucis de la journée au pied de l’immeuble et de permettre à son esprit de divaguer vers de beaux souvenirs d’enfance.

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Un peu plus loin, on peut même découvrir une vitrine remplie de jouets.

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Tandis que la chambre vitrée laisse apercevoir un écriteau « The Tattorialist ». Nicolas Brulez et Mylène Ebrard seraient-il dans les parages ?

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UN LIEU HYBRIDE POUR CASSER LA ROUTINE


La Maison Sage n’est pas qu’un lieu de fête.

Toutes les deux semaines on y découvre une nouvelle exposition.

Actuellement c’est Plume Heters Tannenbaum, photographe, qui utilise le corps comme un outil pour aborder des questions autour du regard, du désir et de la solitude, qui joue les prolongations.

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Thomas et Romain soulignent leur envie de révéler des artistes, « On veut avoir de jeunes talents sur les murs car on apprécie leur travail et nous avons une communauté sensible à cela ».

Mais le duo ne s’arrête pas là, car la chambre se transforme aussi régulièrement en studio de tatouages.

Le dimanche, les animations sont différentes.

Place à la « Journée B(R)UNCH OF FRIENDS » où l’on retrouve notamment des ventes privées, des démonstrations et des cours artistiques, et même des séances de yoga (disco).

La sélection est à l’image du duo : « Nous fonctionnons de façon instinctive, on rencontre des gens qui nous parlent de leur passion et nous les invitons à s’exprimer dans l’espace. » me confient-ils.

Dans La Maison Sage tout est possible.

Romain et Thomas envisagent même d’ouvrir en journée, le samedi. Le lieu est encore tout nouveau, donc les évolutions et les hypothèses sont nombreuses : de l’évènementiel pour les entreprises, des espaces coworking pour les créatifs, des résidences d’artistes et de musiciens… Tout est évolutif. La vision à quatre, cinq ans des associés fait rêver. Le commerce au rez-de-chaussée serait idéalement un tatoo corner, un barbier, un concept store et un snack. « On souhaite également développer un peu de textile » me confie Romain.

Sans compter que le site web de La Maison Sage est avant tout un media, tourné vers l’art et la culture.

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« On va voir au fur et à mesure ce que cela va devenir, en fonction des énergies des uns et des autres. On ne s’est pas fixé de limite. » souligne Thomas.

De quoi faire de La Maison Sage l’un des plus beaux spots lifestyle de Paris.


TOC , TOC, TOC


C’est bien beau tout cela, mais comment passer la porte de La Maison Sage ?

La volonté d’en faire un lieu à part est palpable. Conçu comme une habitation, La Maison Sage en a également ses règles. Comme chez un ami, nous ne sommes jamais vraiment sûrs de pouvoir y passer la nuit, l’ambiance est conviviale et les places limitées.

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Ne pensez surtout pas qu’il vous faut arriver, devant l’entrée, en voiture de luxe. La Maison Sage n’est pas un club du 8eme arrondissement Paris. La sélection ne se fait ni au porte monnaie, ni à votre tête, en somme il n’y a pas de discrimination. Cependant il y a bien une sélection. Celle de l’énergie ! Peu importe votre origine ou votre catégorie socio professionnelle. Le physionomiste Daniel, qui vient du Bus Paladium, vous réservera le même accueil.

Chaque soir Thomas et Romain s’appliquent à créer une atmosphère légère, infantile où on laisse tout apparat social au vestiaire lorsque l’on pose sa veste.

Du coup, on retrouve un vrai melting pot comme au Palace, ou au Baron, ou à La Mano. Des lieux mythiques où la sélection est, et était pointue, mais où pourtant à l’intérieur, tous types de personnes se côtoyaient. Si les fondateurs confient, cibler aussi une communauté créative qui leur ressemble, il n’y a pas vraiment de style établi.

Le seul conseil que je peux vous donner c’est de montrer votre personnalité à l’entrée (surtout si elle est cool et joyeuse) et pas de stress au risque de paraître du coup, beaucoup moins sympathique que vous l’êtes en réalité. Après tout, Daniel, le physionomiste, est le garant du bon équilibre, et l’hôte de la soirée.

Car la réussite de La Maison Sage est dû également à sa communauté fidèle et particulièrement enthousiaste.

Romain se souvient « Dès la première semaine on a vu des gens venir quasiment tous les soirs. C’est devenu leur rendez-vous. D’ailleurs l’un de mes amis, restaurateur, vient à La Maison Sage tous les jeudis soir après avoir fermé son établissement. C’est la magie de ce lieu, d’avoir des habitués, mais aussi de découvrir de nouvelles personnes chaque soir. ».

D’autant que je peux vous assurer, qu’après avoir participé à une soirée, et rencontré les fondateurs très accessibles, vous allez très vite devenir, à votre tour, un habitué.

RDV DU MERCREDI AU SAMEDI DE 19H A 2H ET LE DIMANCHE DE 12H A 2H AU 15 BOULEVARD SAINT-MARTIN 75003 PARIS

On s’y retrouve ?

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  1. Post comment

    Sabrina.espritmode says:

    Waouh très bel article complet qui donne envie de découvrir ce lieu !
    Tu m’as convaincu la prochaine fois que je monte sur Paris j’obligerais mes amis à m’y emmener ( :

    Sabrina
    http://www.espritmodebysabrina.fr

  2. Post comment

    Jolie petite étoile blog says:

    Salut ma belle! C’est un très beau projet que ce petit cocon… En espérant qu’il se développe dans d’autres villes! ?

    1. Oui l’idée est top ! Ca serait génial en effet d’en retrouver dans plusieurs villes 🙂

  3. J’adore ce genre projets qui sort des sentiers battus! Merci pour la découverte! Dommage que je sois si loin!

    1. Bonjour Julie, en effet le projet est loin d’être conventionnel et ça laisse encore présager de belles choses 🙂 N’hésite pas à y passer si tu t’organises un petit séjour dans la capitale.

  4. article intéressant, malheureusement le lieu n’est pas accueillant le soir. Vigile très agressif. Privilégiez les autres moments